

Le Festival dévoile son palmarès en plein black-out sur Cannes
La cérémonie de clôture du Festival de Cannes se déroulera "dans des conditions normales" samedi, promettent ses organisateurs, en dépit de la panne de courant massive qui touche la ville et sa région depuis le milieu de matinée.
Alors que 160.000 foyers sont privés de courant, selon les autorités locales et le gestionnaire du réseau de transport d'électricité, "le Palais des Festivals a basculé sur un système d'alimentation électrique indépendant, ce qui permet le maintien de tous les événements et projections prévues aujourd'hui", ont-ils indiqué dans un communiqué.
En début d'après-midi, le siège du festival faisait d'ailleurs figure d'ilot d'activité au milieu d'une ville presque à l'arrêt, avec ses restaurants fermés, ses commerces n'acceptant plus que les espèces et ses policiers assurant la circulation à la place des feux tricolores.
Dans ce contexte pour le moins inhabituel, qui décrochera la Palme d'or du 78e Festival de Cannes ? Les choix de Juliette Binoche et de son jury, réunis en conclave pour désigner, parmi les 22 films en compétition, le successeur d'"Anora" de l'Américain Sean Baker, sont très attendus, au terme d'une compétition particulièrement ouverte.
Ils pourraient envoyer un signal politique fort en sacrant le dissident iranien Jafar Panahi, l'Ukrainien Sergueï Loznitsa ou le Suédo-égyptien Tarik Saleh, récompenser un jeune talent ou marquer l'histoire en décernant une troisième Palme aux frères Dardenne.
Ils doivent remettre au moins six autres trophées, dont les prix d'interprétation féminine et masculine, au cours d'une cérémonie qui débutera à 18H40 (16H40 GMT).
- Charge contre les autorités iraniennes -
Jafar Panahi, 64 ans, a marqué les esprits avec "Un simple accident", conte moral auscultant le dilemme d'anciens détenus tentés de se venger de leur tortionnaire, déjà récompensé du Prix de la citoyenneté samedi.
Saluée par les critiques, cette charge contre les autorités iraniennes résonne avec le sort de Panahi, emprisonné deux fois en Iran, où ce long métrage tourné clandestinement pourrait lui valoir des représailles.
"Ce qui importe le plus, c'est que le film ait été réalisé. Je n'ai pas pris le temps de penser à ce qui pourrait arriver. Je suis vivant tant que je fais des films", a-t-il déclaré à l'AFP.
L'arrivée du réalisateur à Cannes, après avoir été assigné pendant 15 ans en Iran, était un moment fort.
Au-delà, cette 78e édition a fait écho aux guerres au Proche-Orient et en Ukraine. Elle a aussi été marquée par des déclarations engagées, à commencer par la charge de Robert De Niro contre Donald Trump.
Côté paillettes, la quinzaine a connu ses défilés de stars, de Denzel Washington à Tom Cruise, venu présenter le dernier "Mission: Impossible", en passant par Scarlett Johansson, pour son premier film de réalisatrice, et Nicole Kidman.
Parmi les autres films de la compétition qui ont séduit les critiques, "Deux procureurs" de Sergueï Loznitsa propose, en remontant au temps des purges staliniennes des années 30, une réflexion sur l'arbitraire.
- Rôles féminins marquants -
Les faveurs du public sont allées à "Nouvelle vague", hommage réjouissant de l'Américain Richard Linklater à Jean-Luc Godard, et madeleine de Proust pour les cinéphiles. Mais surtout au Norvégien Joachim Trier pour "Valeur Sentimentale", un mélodrame entre rire et larmes ovationné une vingtaine de minutes, un record.
Son acteur suédois Stellan Skarsgard est en lice pour un prix d'interprétation, tout comme le Britannique Josh O'Connor (le prince Charles de "The Crown"), dans deux films, ou l'Américain Joaquin Phoenix, intense dans "Eddington".
Parmi les nombreux rôles féminins marquants, l'Américaine Jennifer Lawrence se livre totalement en mère qui bascule dans la folie dans "Die, My Love". Une nouvelle venue, la Française Nadia Melliti, se fait remarquer dans "La petite dernière", sur une jeune musulmane qui découvre son homosexualité.
Le film a obtenu la Queer Palm vendredi. Cannes pourrait primer sa réalisatrice, l'actrice française devenue cinéaste Hafsia Herzi, 38 ans, et poursuivre ainsi son renouvellement, après avoir donné la Palme d'or ces dernières années à ses compatriotes Julia Ducournau et Justine Triet.
Autre trentenaire qui a marqué les esprits mais divisé profondément la critique, le jeune prodige du cinéma chinois Bi Gan, 35 ans. Nouvelle venue sur la Croisette, l'Allemande Mascha Schilinski, 41 ans, plonge elle, dans "Sound of Falling", dans un labyrinthe de traumas familiaux transmis de mères en filles.
A l'opposé, le jury pourrait remettre une nouvelle Palme d'or aux frères belges Jean-Pierre et Luc Dardenne, 74 et 71 ans, pour "Jeunes mères", qui a reçu le Prix du Cinéma Positif vendredi. Les septuagénaires deviendraient alors les premiers réalisateurs de l'Histoire à recevoir trois Palmes.
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T.Sauer--FFMTZ